Activités

Activités

Symposium de 2019

Les événements organisés dans le cadre de Liveness at Play ont eu lieu entre le 30 septembre et le 4 octobre 2019; on peut les voir comme des réunions de planification initiales liées à la subvention du CRSH, Sustaining Liveness in Participatory Experiences. Ces événements ont réuni les principaux membres des équipes Liveness de Montréal et de Londres, ainsi que Jaakko Stenros, notre collaborateur finlandais. Le vendredi 4 octobre, nous avons organisé un symposium d’une journée explorant les thématiques de la subvention. Le symposium était ouvert au public et présentait d’autres conférenciers invités, dont Lawrence Switzky et Matteo Uguzonni.

Des capes, pas des manteaux

Le 9 mars 2019, le Groupe de recherche Liveness a confectionné des capes, pas seulement par amour de la mode ou pour montrer ses talents de couturier, mais aussi pour expérimenter l’utilisation d’accessoires de costumes lors d’un test de jeu ultérieur de ce qui est devenu L’AUTRE marché.

Le travail lié à la conception et aux tests de jeu d’une telle expérience publique et participative a bien sûr été fortement limité par la pandémie de COVID-19. Néanmoins, nous avons poursuivi nos rencontres sur une base régulière, mais en ligne, pour discuter de façon approfondie des critères de conception et de questions liées aux recherches connexes.

Peddling Mysteries : Un prototype de jeu de société basé sur l’interactivité

Scott DeJong and Courtney Blamey

Comment concevoir une vie participative après la fermeture, littéralement, du monde? Alors que nous travaillions sur le désormais baptisé AUTRE marché et que nous étions ralentis par le confinement dû à la pandémie, nous voulions quand même toujours explorer ce à quoi pourrait ressembler le jeu. C’est ainsi qu’est né un tourbillon de papier brouillon et de prototypage sur papier, qui a abouti à un prototype de jeu de société jouable, qui a lui-même contribué à la création du jeu final. Intitulé Peddling Mysteries, le jeu modélise la visite d’un marché d’un autre monde. Décortiquons-le.

À l’époque, nous avions l’idée de concevoir un jeu pour des groupes de trois personnes en train de parcourir un marché, et dont chaque participant a son rôle propre. On a jugé qu’il fallait s’orienter vers des modèles de jeux coopératifs à la jouabilité asymétrique. Bref, trois personnes, jouant chacune un rôle différent mais pas les un.e.s contre les autres, et qui sont confrontées au système. Les rôles seraient les suivants : le.la colporteur.euse (capable de faire du troc), l’artisan.e (capable de fabriquer), et le.la flâneur.euse (en mesure de capter une vision d’un autre monde).

Figure 1

Nous savions également que cela se passerait dans un marché, et nous avons utilisé l’outil de création de carte en ligne Inkarnate pour réfléchir à la façon dont un tableau indicatif pourrait orienter les joueur.se.s (Figure 1). Le marché se devait d’être vivant, interactif et dynamique – nous avions ici besoin de quelque chose de plus attractif que l’art à lui seul. Nous nous sommes concentrés sur l’environnement et avons créé des cartes-outils qui indiquent où, dans l’espace du marché, se trouvent les divers étals et se déroulent les  interactions et activités. Nous avons donc fait deux choses : équiper chaque étal de son propre ensemble de marchandises à échanger, et le doter d’un «événement» survenant chaque fois qu’un.e joueur.se y pénétrait.

Figure 2

Pour y arriver, nous avons dû passer de l’art joli – parfois même un peu ridicule- à des cartes topographiques (souvenez-vous qu’il ne s’agissait que de prototypage papier) (Figure 2). Nous avons eu recours à Roll20 pour simuler un plateau de table et avons créé un ensemble de cartes pour situer les diverses boutiques, toutes porteuses d’un récit spécifique (Figure 3).

Figure 3

Mais pour respecter le principe fondamental du jeu, il fallait un défi, un obstacle à surmonter par le joueur. Retourner simplement une carte en visitant une boutique ne suffisait pas, ni ne donnait au marché ce sentiment de vie débordante recherché. Nous avons donc créé deux autres choses : les cartes-événements et la notion de corruption. Inspirée d’autres jeux coopératifs, la corruptionse présente sous la forme d’une échelle mobile qui indique comment les actions des joueur.se.s (ou l’absence d’actions) contribuent à l’instabilité du marché.

Figure 4

L’effet recherché par l’ajout de la corruptionétait de créer de l’adversité. Les joueurs devaient en effet boucler leur quête de marchandises avant la fermeture du marché afin de pouvoir débloquer un récit. Mais la corruptioninfluence ce récit et donc, la façon dont le marché peut fermer. A chaque tour, le.la joueur.se devait tirer une carte-Événement, ce qui occasionne de la corruption, ou a un impact sur la suite du jeu en fonction de la somme de corruption accumulée (Figure 4). Cela devait non seulement donner l’heure juste aux joueur.se.s, mais aussi leur faire prendre conscience des conséquences de leurs actions. Certaines boutiques «corrompues» donnaient des problèmes aux joueurs y entrant ou en sortant (Figure 5). Et c’est ici que nous avons rencontré un autre défi de conception : comment représenter les acteurs déambulant dans le marché.

Figure 5

Dans un GN (jeu grandeur nature), on tient le déplacement spatial des participant.e.s un peu pour acquis ou comme faisant partie du rythme du jeu, l’itinéraire des joueurs.es s’effectuant selon le choix de la destination. Pour nous, cela s’est traduit par la fabrication de mécanismes de jeux de société. A l’époque, nous voulions poursuivre avec la même infrastructure que celle de L’AUTRE marché, qui impliquait que chaque joueur collecte des informations grâce à ses propres aptitudes et à ses connaissances. Les joueur.se.s formaient ainsi une équipe ou chaque personnage déployait son habileté propre, soit échanger avec des marchands (les colporteur.se.s), créer des ressources pour l’équipe (les artisan.ne.s), et les dépenser pour obtenir des atouts particuliers ou réduire l’indice de corruption (les flâneur.se.s). Ces mécanismes ont été associés à un ensemble d’actions de base, comme le déplacement et la manipulation de cartes, qui leur ont permis d’exercer leurs compétences. Nous voulions que les actions restent simples, mais que les choix qu’elles impliquent s’intègrent dans l’environnement du jeu et que les joueurs puissent influencer l’environnement du marché par leurs actions et leurs décisions.

Malheureusement, Peddling Mysteries est demeuré à l’état de prototype. Mais il est la preuve qu’on peut transposer un GNL en jeu de société, et nous a donné l’occasion de tester des idées. Il nous a appris à quel point tout peut changer lors d’un prototypage itératif et qu’il faut parfois abandonner ses idées-chouchous. Le jeu était prometteur et a fourni des pistes de réflexion intéressantes sur la coopération en direct dans un temps «tout sauf vivant». Les outils numériques ont créé une certaine interaction et le fait de réunir les joueur.se.s à des tables virtuelles a favorisé leur participation active. Aujourd’hui, ce jeu dort sur une étagère et sur Google Drive, tel un souvenir du design à l’ère de la COVID, tandis que L’AUTRE marché poursuit sa vie dans sa forme finale.